Diffusion : fonction et mission ?
Doit-on considérer la diffusion selon une double perspective, c’est-à-dire à la fois comme fonction et comme mission ? Dans le premier chapitre de l’ouvrage sur Les fonctions de l’archivistique contemporaine, Carol Couture réitère la position exprimée dès 1982 dans Les archives au XXe siècle à l’effet que la fonction de la diffusion doit aussi être considérée « comme un volet de la mission dont l’archiviste doit répondre dans la société. 1 Une position renforcée en quelque sorte par le choix de la terminologie puisque, dans l’optique de Guinchat et Menou, « La diffusion de l’information est la raison d’être des unités d’information et doit être leur préoccupation essentielle. » » Une position qui, nous l’avons constaté, n’avait rien d’exceptionnelle dans le contexte des années 1980 en archivistique.
Charbonneau, pour sa part, tient à souligner que « les avis sont partagés quant à la diffusion comme finalité de l’archivistique ». Effectivement, plus souvent qu’autrement l’attention qui est accordée à la diffusion vient après coup, après que toutes les autres étapes de traitement ont été effectuées, sans compter que l’approche orientée-usager est loin de faire l’unanimité dans le milieu archivistique.
Tout compte fait, que l’on soit pour ou contre importe peu. Car s’il est du devoir de l’archiviste, dans le respect des lois et règlements, de communiquer les documents d’archives aux usagers, cette tâche, bien que cruciale, ne constitue pas une fin en soi. Elle n’est qu’un moyen, qu’une étape dans le processus qui justifie la conservation des archives : leur exploitation. Un glissement de sens fait en sorte que la fonction devient soudainement la mission. Or, rappelle Elsie Freeman Finch avec justesse dans son ouvrage sur les relations publiques pour les archivistes : « Use is our reason of being. »
En fait, considérer la diffusion en tant que finalité engendre une double distorsion. Comme le mentionnaient Ducharme et Rousseau, « le rôle de conservation des archives est important, en autant que les documents puissent être exploités par la suite. » , c’est-à-dire que « la mission dont l’archiviste doit répondre dans la société », pour reprendre les termes de Couture, ce n’est pas la diffusion mais bien l’exploitation des archives. Par ailleurs, en mettant l’accent sur l’archiviste, cela empêche d’accorder toute l’attention voulue au principal acteur de la diffusion : l’usager. C’est son action qui est déterminante et qui représente la finalité des archives.
Nous aurons mis du temps, nous aussi, à faire la différence2 À titre d’exemple, dans un article sur les sites Web des services d’archives universitaires , nous reprenions l’idée que la diffusion est l’objectif ultime des archivistes sans nous rendre compte du glissement de sens que cela impliquait. Surtout qu’en conclusion, nous soulignions que ce qui constitue l’essentiel, c’est l’utilisation. à savoir :
Que l’archivistique doit être pensée depuis l’exploitation des archives plutôt que depuis leur production dans la mesure où celle-ci ne peut produire qu’une pensée fragmentaire et lacunaire en oubliant les raisons d’être tant de la pratique professionnelle que de la discipline et de leur objet. (Klein, 2015, p. 273)
- 1Une position renforcée en quelque sorte par le choix de la terminologie puisque, dans l’optique de Guinchat et Menou, « La diffusion de l’information est la raison d’être des unités d’information et doit être leur préoccupation essentielle. »
- 2À titre d’exemple, dans un article sur les sites Web des services d’archives universitaires , nous reprenions l’idée que la diffusion est l’objectif ultime des archivistes sans nous rendre compte du glissement de sens que cela impliquait. Surtout qu’en conclusion, nous soulignions que ce qui constitue l’essentiel, c’est l’utilisation.