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« The Symbolic Significance of Archives »


J’ai relu avec beaucoup d’intérêt l’article de James M. O’Toole sur la signification symbolique des archives. Son but est de montrer que, contrairement à la vision la plus répandue en archivistique, les archives n’ont pas uniquement une dimension pratique mais aussi symbolique1Comme le soulignait Martine Cardin, lors du 12e Congrès international des archives, cette conception est le propre d’une approche fonctionnelle de l’archivistique découlant des travaux de Theodore Schellenberg. « L’approche fonctionnelle réduisait les dimensions matérielles et symboliques inhérentes à l’identité organisationnelle. On considère que seule l’action administrative donne un sens à l’existence des documents. » . Ainsi, à l’aide de nombreux exemples, O’Toole distingue six aspects pour en faire la démonstration :

  • En premier lieu, il fait valoir que pour certains types de documents (ex. : la Bible familiale, les diplômes, les testaments), « Useful information was surely present in these records, but their meaning was more symbolic than practical » , en raison des valeurs, des sentiments d’attachement, d’achèvement qui y sont rattachés2Aspect qui correspond, en somme, à ce que l’on désigne par valeur intrinsèque. « Intrinsic value describes the value that records have as artifacts—as symbols, or tangible links to the past. »  ;
  • Deuxièmement, il fait remarquer que « The general appearance of records has been important to their meaning from the beginning of their widespread use and acceptability, and this remains true today. »  ;
  • Troisièmement, en faisant référence à l’acte d’écrire et notamment à la signature, il souligne que : « In many instances, the symbolic significance of records derives from the act of recordmaking rather than from the record that results. »  ;
  • Quatrièmement, « If the making of records can be an action full of symbolic significance, so can their use. Records are often put to a number of broadly ceremonial » , tout particulièrement dans le contexte religieux mais aussi dans celui de l’enseignement. « Colleges and universities are equally good places to observe the ceremonial use of records, frequently focused on the diploma. »  ;
  • Enfin, les deux derniers aspects sont en quelque sorte liés. D’une part, « the records are revered as objects in themselves more than they are valued for their contents » , il suffit de penser à la Déclaration d’indépendance ou à la Constitution aux États-Unis. D’autre part, « If records can be revered as talismanic objects, they may also be despised. Records may evoke as much hostility as reverence » , d’où le fait que « Destroying records may be an important instrument of war, politics, or religion. »

En conclusion, O’Toole rappelle aux archivistes l’importance qu’ils accordent au contexte de création :

To understand records, archivists say, one must understand as much as possible about the circumstances that produced them. Achieving that understanding demands that we look not only at the practical, utilitarian context of records but at the symbolic context and meaning as well. If we continue to overlook that aspect of our work, our task as archivists remains only half done.

Ainsi, aux valeurs (primaires et secondaires) et fonctions (de preuve, de témoignage et d’information) associées au contexte utilitaire, il est nécessaire que les archivistes prennent également en considération les propriétés liées au contexte symbolique (Figure 3) s’ils souhaitent remplir pleinement leur tâche.

Figure 3 : Les propriétés des archives selon les contextes utilitaire et symbolique.
Sources :  ; .

Au sujet de la dimension symbolique, il est à noter que parmi les critères d’évaluation servant à baliser le processus d’acquisition des archives privées, le Conseil canadien des archives tient compte du fait que

Au-delà de l’information qu’ils recèlent, certains documents possèdent une valeur symbolique de par la manière puissante qu’ils ont d’évoquer un sens d’identité. Ces documents témoignent de la naissance d’une organisation (e.g. [sic] constitution, charte), d’événements marquants (e.g. manifeste) ou, par leur seule existence physique, affirment un sentiment d’enracinement (e.g. arbre généalogique). Ils acquièrent donc la qualité de symbole d’un aspect fondamental de l’expérience humaine en général ou de l’existence du créateur du document en particulier.

C’est là également le point de vue exprimé par Anne MacDermaid dans l’ouvrage The Archival Imagination :

The self-evident purpose for preservation of archival documents is the communication of their contents, either to contemporaries or to future generations. However, while this purpose has been proven and sanctified by historical practice, the intellectual content of the documents is not the only information communicated. In addition, the symbolic value of documents is also transmitted.

En effet, selon Martine Cardin, « L’information organique et consignée s’inscrit toujours dans une dimension symbolique qui lui procure un sens. Un organigramme, par exemple, traduit concrètement une structure hiérarchique et y ordonne les relations. » C’est donc dire qu’au Canada et au Québec, plusieurs archivistes partagent le point de vue exprimé par James M. O’Toole.


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    Comme le soulignait Martine Cardin, lors du 12e Congrès international des archives, cette conception est le propre d’une approche fonctionnelle de l’archivistique découlant des travaux de Theodore Schellenberg. « L’approche fonctionnelle réduisait les dimensions matérielles et symboliques inhérentes à l’identité organisationnelle. On considère que seule l’action administrative donne un sens à l’existence des documents. »
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    Aspect qui correspond, en somme, à ce que l’on désigne par valeur intrinsèque. « Intrinsic value describes the value that records have as artifacts—as symbols, or tangible links to the past. »